Claude Fontaine
Tracklist
1 Cry For Another
2 Hot Tears
3 Little Sister
4 Love Street
5 Play by Play
6 Pretending He Was You
7 I'll Play The Fool
8 Strings of Your Guitar
9 Footprints in the Sand
10 Our Last Goodbye
Ce qu'en pense la Rédac'
Claude Fontaine : Claude Fontaine
Claude Fontaine : Claude Fontaine

Auteur : François Laboué
Publié le 07 mai 2019

London Calling

Portobello Road, Londres. Une femme qu'on dirait tout droit sorti d'un film de François Truffaut entre chez Honest Jon's, disquaire londonien établi depuis 74. Claude Fontaine émerveillée, tombe amoureuse : Trojan, Studio One... Trésors de la musique jamaïcaine, mais également pépites de la musique populaire brésilienne, le disquaire lui a ouvert les portes d'un monde inconnu jusque là. Comme une fraiche passion, un coup de foudre, elle passe ses journées avec ces albums oubliés. Jusqu'à ressentir le besoin d'en faire un à son tour. Et on est heureux d’accueillir Claude Fontaine dans notre grande famille musicale.

Un disque, deux voyages

L'album est construit en diptyque. La face A nous emmène à Kingston, tandis que la face B nous porte 4000 km plus loin, dans les terres du Brésil. Un album mélancolique qui composerait une longue lettre d'amour murmurée par une voix angélique et nuageuse.

On retrouve pour commencer un mood early reggae. On se balade entre reggae, ska & rocksteady, au gré de lignes de basse aussi lourdes qu'un soleil de plomb. Les mélodies sonnent comme les secrets d'une âme perdue. Des tunes enregistrées à l'ancien studio de Chet Baker, Sage and Sound, parfaitement masterisées pour chanter les peines du cœur. L'écho de la voix de Claude Fontaine renforce cette ambiance cotonneuse et planante. Mais ce disque est loin d'être une simple reproduction de ce qui se faisait à l'époque ; elle y ajoute sa touche particulière, celle d'un esprit libre qui n'a jamais pu trouver quelque part ce qu'elle pourrait appeler « chez soi ». Dommage de croiser seulement deux trop courtes phases dub, on reste sur sa faim. Cette première partie d'album fait repenser à l'excellent Nothing More To Say des Frightnrs, dernière réussite dans le genre early reggae revival.



L'autre face nous plonge dans une bossa nova onirique et toujours aussi imprégnée d'amours perdus. Chaque son est riche, imagé, coloré. Transporté par la voix toute aussi planante et les textes personnels d'une femme blessée, on se balade dans une jungle de sonorités tropicales.
Claude Fontaine affirme son ouverture d'esprit en proposant ces deux ambiances. Mais c'est aussi la preuve d'une passion débordante, de ne pas choisir entre ces deux styles. Les faire cohabiter sur un même disque, tout en restant harmonieux, est un beau tour de force.

La liste des rêves

Exactement comme ce qu'elle a vécu, la chanteuse voulait que cet album s'écoute comme un vinyle oublié d'un vieux disquaire. Objectif réussi. C'est évidemment grâce à un travail d'équipe, car on parle quand même d'une belle bande de vétérans qui entoure la jeune femme : Tony Chin, guitariste qui a joué avec King Tubby ou Dennis Brown, entre autre. Ronnie McQueen, bassiste de Steel Pulse. Rock Deadrick à la batterie, qui joue avec Ziggy Marley. Et bien d'autres, des noms pas toujours connus du grand public, mais qui ont contribué à la création d'albums légendaires. Mais comment une chanteuse, qui démarre, seule, se retrouve à créer un projet aussi abouti, avec des musiciens aussi renommés ? Talent et détermination. Expliqué sur le site du label, Innovative Leisure, a force d'appels et de mails, elle finit par contacter la dream-team qu'elle avait dressée sur sa liste. Puis de les convaincre grâce à une bande démo. Une belle histoire du début à la fin.

Semiologie tropicale

La pochette de l'album raconte très bien cette histoire. On retrouve la chanteuse, qui se retrouve nez à nez avec un perroquet, comme l'instant d'une nouvelle rencontre prise sur le vif. Les couleurs vives de l'oiseau éclaire la scène ; une lueur dans une atmosphère sombre, symbole de renouveau, promesse d'une liberté. Claude Fontaine, tournée vers la gauche, respectueuse du passé. Le perroquet, regard vers la droite, laisse imaginer les envolées futures. Deux profils particuliers pour une oeuvre à deux facettes. Une photographie pleine de sens pour un album riche et complet. Aucun nom, typos ou autres informations, une absence transmettant l'idée d'ébauche, quelque chose de si neuf qu'encore innomé ; quelque chose de volatile, sobre, humble.

Ne reste plus qu'à vivre Claude Fontaine en live, qu'on espère aussi intime et riche que l'album. En attendant, on se paye avec délice des allers-retours entre ces deux terres musicales.

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