Interview : Rico de OBF Sound-System

Interview : Rico de OBF Sound-System

A l'occasion de la sortie de l'album de Nazamba produit par O.B.F. nous sommes allés à la rencontre de Rico, selecta du O.B.F. Sound System.

Auteur : Simon Pernin
Publié le 05 juillet 2019

Nazamba

OBF s’attaque à un nouveau style de reggae avec un projet 100% Dub Poetry en collaboration le jamaïcain Nazamba.
Un album puissant et profond qui dépeint et analyse la vie quotidienne des jamaïcains.
L'occasion pour nous de nous replonger dans les débuts d’OBF. On fait le rewind avec Rico !

Tu te rappelles de la première fois où tu as écouté du reggae ?

Les premiers morceaux que j’ai écoutés en reggae ça devait être, comme tout le monde ici en Europe, à la radio en écoutant Bob Marley. Après, quand j’ai écouté en tant que reggae lover, c’était à l’âge de 17-18 ans après avoir écouté du rap. Je m’intéressais de plus en plus au reggae à cette époque en allant voir des sounds, des concerts ou en allant au shop d’Asher Selector à Genève où j’achetais des vinyles de reggae.


Quel est le premier sound que tu as vu ?

Alors à l’Usine, on pouvait voir Gregory Isaac ou les Gladiators par exemple, des concerts organisés par Asher Selector. Après, on allait voir des sound-systems dans des squat organisés par Cultural Warriors. Du coup, pendant les premières soirées qu’on a faites, il y a avait RDK Hi-Fi de Londres. Et un peu après, je suis parti en Angleterre après mes 18 ans. Je me suis intéressé plus à des sounds comme Aba Shanti. Au Subdub aussi à Leeds où là, ça à vraiment fait notre éducation, surtout grâce aux liens qu’on a établis avec Mark Iration de Iration Steppas. C’est une petite anecdote : c’était un pote à lui qui écoutait notre son et Mark est rentré chez lui, il a demandé qui c’était à son ami. Et le soir même je recevais un email de lui dans lequel il écrivait : « I Love your Dub ! ». C’était vraiment le premier à faire un link avec nous, et qui a promu la musique d’OBF à ses tous débuts. C’est lui qui nous a pris sous son aile.


Comment t’es venue l’idée ou l’envie de créer ton sound-system ?

Quand on était jeune, on écoutait des Irations, des Gussie P et on aimait bien ces morceaux. Mais on ne pouvait pas jouer que ça toute la nuit. Il nous manquait des vinyles, des morceaux. Du coup au lieu de les chercher ces vinyles, je me suis dis que j’allais les créer tout simplement. Je m’inspirais de ce qui sortait et je rajoutais ma patte à l’époque.


Comment votre sound-system a t-il évolué avec les années ?

OBF Sound System

Le sound-system a commencé avec deux basses qui ont été construites par un des oncles de Guillaume (l’opérateur). Après, on a acheté des médium-aigu sur le bon coin, puis on a construit les quatre prochaines boxs avec un ami polonais. Donc bien-sûr, on galérait à les créer, c’était vraiment compliqué. On a reconstruit quatre bass, ce qui nous fait 6 bass. On a construit nos propres aigus et on a construit nos propres médiums. On a de nouveau rajouté deux autres bass. Puis on a bossé avec Shortman pour construire un autre sound-system. Il a notamment bossé pour Iration Steppas ou King Earthquake. Il est venu à la maison pendant un mois, et on a construit la deuxième génération du sound-system d’OBF avec 12 bass et 12 tops. On voulait être là pour toutes les étapes, car pour moi si tu as un sound-system, et que tu veux vraiment savoir comment ça fonctionne, si tu veux te rendre compte du prix, de la sueur, et de tout ce que tu dois mettre dedans, il faut le créer de ses propres mains. Ce n’est pas une chose facile. Pour après avoir la rage en session et pour jouer comme un sound-system doit jouer, tu dois être là à la construction pour pouvoir maîtriser toutes les étapes. Après, il y a eu la troisième génération où là quand on était en tournée au Japon on a rencontré un designer de sound. Ils nous ont désigné nos propres OBF boxes pour les médiums bas et les bass. Donc on a eu trois générations du sound-system OBF.


Quel rapport entretiens-tu avec ton sound-system ?

Il nous coûte très très cher (rires)! Il nous fait très mal au dos ! Mais par contre, quand tu es en soirée, que tu joues tes morceaux sur ton propre sound-system et que tu es arrivé à faire ce que tu voulais, c’est comme si c’était une prolongation de nous même. C’est le meilleur instrument pour retranscrire ce qu’on fait en studio. Ça retranscrit exactement ce qu’on a envie de partager avec les gens.


Pour quelles raisons as-tu été plus attiré par le sound-system que par le live ?

On a commencé dans le DIY, vraiment on a commencé nos soirées dans des caves de squat, on vivait en crew dans des squats sur Genève. Du coup dans les caves, il n’y avait pas de sono, pas de stage. Donc on jouait au sol, au même niveau que les gens, on ramenait notre matos sinon on ne pouvait pas faire de soirée. C’était vraiment le fait de s’autogérer et le DIY qui nous plaisait. En live, je n’avais pas ce moment où j’arrivais en trans à un moment, alors que je retrouvais ça dans des salles enfumées, lugubres, mal éclairées, avec le gros son de bass.


La vibe du public, c’est l’âme supplémentaire du sound system ?

L’avis du public est en fonction du sélecta. Par exemple, des fois je le ressens en direct quand je suis fatigué ou de mauvaise humeur, l’avis du public change. Donc c’est vraiment les artistes derrière la control tower et le micro qui vont diffuser leurs bonnes vibes au public. Et c’est cet échange qui va créer une bonne vibe. Des fois, en sound-system, tu as des vibes plus spirituelles, entraînantes, la vibe, elle est vraiment en fonction du sound-system qui joue.


La scène dub a changé par rapport à vos débuts ?

Franchement, au début c’était galère. On faisait des milliers de kilomètres pour revenir avec 50 ou 100€ en poche mais on était content. Au fur et à mesure, on a commencé à tourner en France, puis en Europe. Puis on a vu l’explosion des sound-system en Espagne. Et au final ça a explosé un peu dans toutes les villes d’Europe. On a eu de la chance d’arriver un peu avant cette vague de sound-system. Du coup on a pu créer un style, une patte.

Artiste(s)
O.B.F.
France
O.B.F.
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